On ne réécrit évidemment pas l’histoire. Qui mieux que le photographe Henri Cartier-Bresson pour capter la densité d’un moment suspendu ? La fameuse photo à été prise au même endroit en 1961, la petite-fille qui courait au fond de ce décor naturel et presque irréel s’appelait Flora, elle allait rejoindre sa mère qui l’avait interpellé. J’entends encore sa voix dans le silence du village d’Artémonas « φλωωωρααα!». L’instant décisif revient donc également à une mère et sa fille aujourd’hui grand-mère qui vit toujours à quelques mètres du fameux cadre de HCB... Le quartier n’a presque pas changé, ou presque, les marches ont disparu, un café « Mosaïko » arbore son nom dans les yeux d’une chouette, un artiste peintre a sorti un parasol devant son atelier et le soleil s’est caché derrière ces nuages inattendus de ce début de mois d’août. Ce qui nous relie peut-être au passé ce n’est ni la porte ni la fenêtre, c’est probablement le mouvement de la gamine qui traverse la densité du temps. En 1961 ans elle s’appelait Flora, en 2020 elle se prénomme Maria, elle a 14 ans et c’est la petite fille de Flora. D’une femme à l’autre sur le fil invisible de Chronos se dessinent les mêmes mouvements ancestraux de l existence. L’histoire ne se répète pas, même quand le photographe attend « son instant », encore doit-il être suffisamment patient pour le reconnaître. Tant qu’une petite-fille passera au fond du cadre dans l’insouciance de son enfance, alors le monde n’aura pas tout à fait tout oublié.
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